Ceux qui ont eu le plaisir de dévorer l’intégrale de Silo auront une petite idée de ce qui les attend dans cette colonie sensée exploiter une lointaine planète. Pour cela, un consortium a envoyé cinq cent unités humaines composées de cellules maintenues dans un état de semi-conscience, enveloppes charnelles nues et intubées dans un cocon de verre avec une programmation cérébrale gérée par informatique afin qu’une fois l’âge adulte atteint, au terme du voyage, l’être humain alors né soit au comble de ses compétences.
Mais l’IA – comme toujours – démontre ses limites et tente un avortement avant de se reprendre, ne survivent alors qu’une soixantaine d’individus d’une quinzaine d’années. Point totalement formés, propulsés dans un monde en furie, sans vêtements ni nourriture, les voilà obligés de survivre malgré tout…

Passées les premières terreurs, l’appréhension du monde dans lequel ils sont, de cette canopée haute de plus de six cents mètres et qui projettent de drôles de fruits au sol, la découverte du campement à moitié détruit par un incendie, les distensions apparaissent et deux mâles dominants s’affrontent. Car le pire ennemi de l’Homme dans un milieu hostile demeure… l’Homme.

Narrée par le psychologue du groupe, l’histoire de cette survie primitive participe d’un raod-movie haletant où l’on grimpe aux arbres par l’intérieur grâce au boyau creusé par d’étranges créatures au pelage de soie, on marche sur la canopée comme sur le sol, on découvre des animaux-machines qui digèrent la roche et défèquent de l’or ; mais les relations de camaraderies et les affinités électives demeurent, l’amour s’invite et l’aventure emporte le lecteur dans un tourbillon d’images, de bruits, d’émotions fortes qui rendent le récit puissant et envoûtant.
Un grand roman de SF.

François Xavier

Hugh Howey, Une colonie, traduit de l’américain par Aurélie Tronchet, coll. Exofictions, Actes Sud, octobre 2020, 304 p.-, 22 €