Oiseaux par-dessus les frontières

 

Vanneau huppé, mouette rieuse, fauvette des jardins, alouette des champs, pouillot véloce, sans nul doute des noms connus et retenus pour leur poésie simple, peut-être pour certains une image qui identifie bien l’oiseau, pour beaucoup cependant une idée un peu vague de ce qui le caractérise, la couleur du plumage, les habitudes de vie, les lieux d’habitat, le cri, l’alimentation. L’Europe et l’Afrique du Nord abondent en oiseaux de toutes espèces, neuf cents précise l’auteur de ce livre qui est autant un répertoire et un atlas qu’un bel ouvrage. Chaque page est en effet comme un hommage rendu à la gent ailée. « L’oiseau s’est libéré de la terre. Désormais il sera prisonnier du ciel » disait Confucius. Victor Hugo a des mots charmants pour ces invités des airs qui font de plus en plus l’objet d’attentions nombreuses, surtout de la part des citadins qui, une paire de jumelles au cou, partent en ballades pour les découvrir sur leurs lieux de vie.

« Des moineaux francs faisaient l’école buissonnière.

 C’était l’éternité que taquine l’instant.

Ils allaient et venaient, chantant, volant, sautant »

Reconnu en Belgique pour son savoir, bagueur, formateur, ornithologue amateur qui s’est spécialisé au fil de longues années d’observation et d’études dans la protection des oiseaux, André Burnel nous parle avec affection d’environ deux cents espèces qui volent en Belgique, des plaines du Brabant aux buissons de la vallée de la Meuse, des côtes de la mer du Nord et des Flandres aux collines de la région liégeoise. On apprend que la buse dite variable, appelée ainsi en raison de la diversité de ses plumages, est le rapace le plus commun chez nos voisins et que le grimpereau des jardins est un familier de Bruxelles. Que la chevêche d’Athena, qui aime les vieux vergers, prend souvent des bains de soleil ! Que le roitelet huppé est orné d’une raie jaune et rouge sur la tête. Rare, le bruant proyer subsiste surtout dans la région naturelle de la Hesbaye tandis que les mésanges, qui apprécient les mangeoires que l’on accroche ici et là, sont des hôtes plus répandus.

Les bergeronnettes, ce qui peut surprendre, vivent jusqu’à huit ans et quelques mois alors que les effraies ont une longévité de dix-sept ans et la cigogne blanche peut atteindre les quarante années. La nature a ses secrets, comme celui de permettre l’apparition récente en Wallonie d’un corvidé peu connu, le cassenoix moucheté, qui a un faible pour les épicéas et se pose en haut de leurs branches. Si le nombre de choucas des tours s’accroît, à l’inverse, celui du traquet motteux qui se pose sur les mottes dans les champs, d’où son nom, possède un croupion blanc et le « montre volontiers en fuyant au ras du sol devant l’importun », est en déclin.

Car voilà bien le problème, celui de la disparition de beaucoup d’espèces, sous la poussée des nouvelles formes de culture, des coupes sans contrôle des bois, de l’urbanisation, des pollutions multiples. Citons une nouvelle fois Victor Hugo : « Le nid que l’oiseau bâtit si petit est une chose profonde. L’œuf ôté de la forêt manquerait à l’équilibre du monde ». La défense des oiseaux passe par les initiatives des amoureux de ces petits animaux fragiles. En Belgique, comme en France la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) qui compte des milliers de membres qui s’activent dans presque tous les départements, la Ligue Royale Belge pour la Protection des Oiseaux, fondée en 1922, s’emploie notamment à faire évoluer la législation. Prise de conscience salutaire. On pense à Karen Blixen, l’auteur de La Ferme africaine, livre devenu au cinéma Out of Africa : « Il lui avait demandé si elle croyait que les oiseaux étaient des présages de bonheur. Je ne sais pas, disait-elle, je pense que c’est en soi un grand bonheur de les voir ». Ou à Marcel Proust, notant dans A l’ombre des jeunes filles en fleurs : « Aimer aide à discerner, à différencier. Dans un bois l’amateur d’oiseaux distingue aussitôt ces gazouillis particuliers à chaque oiseau, que le vulgaire confond ».

Les oiseaux ne connaissent pas les frontières. Ils volent à leur gré, ils migrent, vont jusqu’en Afrique, reviennent et portent sur leurs ailes le printemps. Ils passent des Ardennes à la Lorraine, comme le bec-croisé des sapins. Les oiseaux de chez eux sont aussi ceux de chez nous. Ces pages répondent aux questions des curieux où qu’ils soient.

Dominique Vergnon  

André Burnel, Les oiseaux de chez nous, éditions Racine, 208 pages, 193 illustrations, 26 x 28 cm, août 2017, 24,95 €.

 

 

 

 

 

 

 

 

Sur le même thème

Aucun commentaire pour ce contenu.