Valentine Penrose : l’amour est un bouquet de violettes
Valentine Penrose distilla l’apologie du saphisme selon diverses entrées. Née en France elle « exporta » le surréalisme en Angleterre. Descendante spirituelle de Virginia Woolf et de bien des amazones britanniques la poétesse fut reconnue d’abord par Eluard (préfacier de deux de ses recueils) et par Bataille lors de sa publication de « La Comtesse sanglante ». Dans cette libre biographie d'Erzsébet Báthory qui propulse au cœur de l'Europe féodale en un " humus de sorcellerie et à l'ombre de la couronne sacrée de Hongrie " l’auteure décline par nimbes son saphisme. On le retrouve plus ouvertement en liberté et toujours plus sexuel qu’amoureux dans « Martha’s Opera » et « Dons des féminines ». Ouvertement lesbiens ses textes naissent de plusieurs sources. Entre autres chez un des maîtres précurseurs du Surréalisme : Gustave Doré. Les textes jouent des codes lesbiens. Rubie héroïne de « Martha’s Opera » évoque par exemple son amante en termes de voilette : « Emily, heaume vivant de violettes ». Dans « Dons de féminisme » l’orphisme se teinte d’un sentiment poétique de la nature : « La feuille a suivi la fleur / Tendis qu’au ciel se lamentent et se destinent / L’eau l’heure la planète et toute chose féminine ».
Valentine Penrose au-delà
du saphisme pur interroge la part féminine de tout être et la transforme dans
une puissance qui n’a rien de passive. Elle reprend l’affirmation de Bataille "Tout
le monde a conscience que la vie est parodique et qu'il manque une
interprétation". Pour sortir de
cette parodie, l’interprétation
lesbienne permet au monde de ne plus marcher
à cloche-pied. Hors vision romantique la
poétesse accorde au saphisme la capacité de diffracter ses poussières de lumière. Elles viennent
s'inscrire en faux contre les espaces d'ombre du désir masculin. Quelque chose flotte dans l'air pour devenir aire. Il n’est pas jusqu’à la robe de
mariée d’offrir une étrange maison et un trouble particulier. L’amour
devient un bouquet de violettes et le plaisir masculin est atteint soudain d'un
trouble schizophrénique. Ce qui fera dire à une des héroïnes de Bataille
en parlant du désir « Pardonne moi, mon dieu, je ne sais plus ce
que j’en dis ». Mais ce ne fut pas le cas de Valentine.
Jean-Paul Gavard-Perret
Nicolas Berger « Valentine Penrose ou les fantasmagories du Désir », Derrière la salle de bain, Rouen, 10 €.
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