"Behemot" - la suite des aventures de Deryn et Alek au cours d'une première Guerre mondiale alternative

BEHEMOTC’est avec grand plaisir que nous retrouvons Scott Westerfeld pour la suite des aventures du prince Alek, jeune héritier qui a fuit l’Empire austro-hongrois après la mort de ses parents et la jeune Deryn, l’orpheline écossaise que se fait passer pour un garçon. Deux personnages que nous avions découverts, il y a un peu plus d’un an dans le premier tome de la série Léviathan. Un an d’attente mais qui le valait bien.

Une créature en cache toujours une autre

Nous avions laissé nos deux héros à bord du Léviathan en route pour Istanbul alors que l’affrontement entre les pays darwinistes, manipulant « les fils de vie» pour leur besoins et les pays clankers, adeptes du tout mécanique débutait. Deryn, qui se cache sous le nom de Dylan est un des jeunes aspirants les plus prometteurs du Léviathan. Alek, héritier du trône d’austro-hongrois, doit cacher son identité à ceux qui l’on recueillit. Tous deux sont liés par une réelle amitié ce qui ne va pas sans poser de difficultés à la jeune Deryn : comment concilier son amitié avec Alek et la fidélité envers son pays alors que l’empire austro-hongrois vient d’entrer en guerre contre l’Angleterre ? Pris aux pièges d’enjeux qui les dépassent, les deux adolescents vont essayer d’influer sur le cours de la guerre et plongent dans Istanbul pour de nouvelles aventures.

Un roman d’histoire alternative

Roman d’histoire alternative, Béhémot s’inspire de faits et de lieux calqués dans une large mesure sur les réalités de la Première Guerre mondiale en y introduisant des personnages, des créatures et des mécaniques de l’invention foisonnante de l’auteur. Ainsi le Sultan Osman I est un authentique bâtiment de guerre commandé par l’Empire ottoman aux chantiers britanniques. Le ministre de la guerre, Winston Churchill, décida bien en effet de le confisquer de peur que l’empire ottoman n’entre en guerre au côté de l’Allemagne. Les Ottomans finirent effectivement par rentrer en guerre à ses côtés en partie à cause de cette provocation. L’influence des Allemands étaient bien réelle : ils y possédaient un journal très populaire alors que l’ambassade britannique ne comptait pas un seul membre capable de lire le turc ! Les cuirassés Goeben et Breslau se retrouvèrent également piégés en Méditerranée et se réfugièrent à Istanbul. Leurs équipages furent ensuite intégrés à la marine ottomane. La différence notable réside dans le traitement de la révolution de 1908 qui, dans le roman, a échoué. Par conséquent le sultan et son vizir sont toujours au pouvoir ce qui permet d’intégrer les personnages à une révolution réussie. L’auteur a également voulu garder intact l’empire pour conserver à Istanbul, sa nature cosmopolite. Une approche intéressante de la première guerre mondiale qui offre un univers de possibilités quant à son dénouement.

C’est également avec plaisir que l’on retrouve les protagonistes du Léviathan. Deryn, d’abord, alias Dylan sous son déguisement de jeune aspirant. La jeune adolescente se retrouve piégée par son mensonge : d’un côté, fidèle à son père et à son pays, elle exécute les ordres qui lui sont donnés toujours avec la peur que l’on découvre son stratagème. De l’autre, ses sentiments envers Alek s’étoffent : s’il a été d’abord un ami, elle commence à le regarder d’une tout autre manière. Alek n’est d’ailleurs pas insensible à Dylan sans qu’il sache pour autant l’expliquer. La situation de Deryn/Dylan devient d’autant plus problématique lorsqu’une jeune fille s’amourache de lui et que le mentor d’Alek découvre sa véritable identité. La situation d’Alek évolue également rapidement : il se retrouve impliqué dans la révolution et apprend que le pape, qui pouvait confirmer son statut d’héritier, est mort. Cela laisse présager des rebondissements forts intéressants. Un autre personnage excite de plus en plus notre curiosité : celui du docteur Barlow, darwiniste d’autant plus convaincue qu’elle est la petite-fille de Darwin. Dans le premier tome, elle avait chargé Dylan de veiller sur des œufs. Dans le deuxième, ces œufs éclosent et une étrange créature en sort : elle s’attache à Alek qui lui donne le nom de Bovril. Toutes les créatures darwinistes sont crées pour répondre à un besoin et possèdent certains dons : celui de Bovril est d’être perspicace même si l’on n’a pas encore saisi son utilité vis-à-vis d’Alek et Dylan ou encore pendant la guerre.

Béhémot est un deuxième tome qui tient toutes ses promesses d’autant qu’il est toujours illustré par les dessins de Keith Thompson. Un roman donc à lire et à admirer. Mais il nous faudra encore attendre quelques mois pour connaître le destin d’Alek et de Deryn.


Julie Lecanu

 

Scott Westerfeld,traduit de l'Anglais par Guillaume  Fournier, Behemot, illustration de Keith Thompson, Pocket Jeunesse, septembre 2011, 477 pages, 19 €

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