Révision des poncifs : Sollers & la peinture, je t'aime moi non plus

A qui veut connaître non seulement la vision de Philippe Sollers sur la peinture mais l’histoire des formes à travers les siècle il conviendra de lire cette thébaïde (mais version hot line) qui en offre le miroir le plus intéressant.

Sous titré "Une contre-histoire de l'art", ce livre concentre l'essence de l'esthétique de Sollers. Tout part de l'Olympia de Manet (image première)  et du gout de Sollers pour les femmes en une  quête inédite et rebelle aux gouts de l'époque.

Que la peinture soit religieuse, à l'antique, bergère, réaliste, conceptuelle ou abstractive importe peu. Dans chaque registre l'auteur fait le tri et retient ce qui appartient à une beauté neuve et convulsive là où elle  chamaille entre Eros et Thanatos.

Rejetant toute classification car elle implique une rigidité et ne peut jamais embrasser l’art dans son mouvement, Sollers sépare son bon grain de l'ivraie et n'accorde son blanc seing et son émotion qu'aux œuvres matricielles qui ne se contentent pas d'être la police des académies de leur époque. Et les peintres élus par l'arpenteur de "L'infini" (la revue) sont accompagnés des créateurs des autres arts (de Mozart à Nietzsche et Rimbaud).

Même au sein de la peinture la plus doloriste, depuis Lascaux à nos jours, Sollers saisit toujours celle où malgré tout  le bonheur qu'inspire les œuvres majeurs. Il est donc à contre-courant des pensées délétères.
A l’intersection de toutes les époques comme des lieux  – l’Europe, le Moyen-Orient l'Amérique ou la Chine – sa pluralité est faite d'une esthétique de l'essor et de la beauté pour peu que celle-ci ne soit pas polycopier.

A la jouissance d'écriture de Sollers répond celle de Rachet. Entrant en symbiose mais non en complaisance avec son sujet il montre combien aux installateurs et actionnismes fiers seulement de leur mouvement les deux larrons en foire de l'art  préfèrent ceux qui ont fait éclore de l'improbable (de Fra Angelico àBotticelli, de Picasso à Bacon). Quant au reste l'un et l'autre n'en parlent même pas ou fissa-fissa. Preuve que Sollers n'a pas de temps à perdre. Même avec la mariée dans sa déclinaison de Duchamp : elle n'est et ne sera jamais la sienne.

Jean-Paul Gavard-Perret

Olivier Rachet, Sollers en peinture, coll. Tinbal essai, éditions Tinbad, mars, 2019, 220 p.-, 21 €

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