Cindy Sherman : la photographie avant toute chose

Ennuyée par la peinture, il n'y avait rien à dire de plus. Je me contentais de copier méticuleusement d'autres œuvres, et j'ai réalisé qu'il aurait alors suffi d'utiliser un appareil photo et de me consacrer à d'autres idées, écrivit celle qui s’orienta vers une radicalité photographique dont Pierre Molinier fut le pionnier. 
À travers – principalement des autoportraits – l’artiste porte l’équivoque dans les genres sexuels en faisant du couple artiste et modèle le criminel et la victime : l'une est  le produit de l'autre et vice versa. Le corps de la femme émerge loin de son statut de machine à fabriquer du fantasme ou d’écrin à hantises. Le passé ne passe plus dans mes œuvres, elles sont créées contre lui  pour des extases négatives, explique-t-elle.  
L’artiste pastiche souvent l'univers de tableaux de maîtres, s’y approprie un grand nombre de genres visuels  (extraits de films,   magazines de charme, etc.). Le livre propose  une synthèse qui éloigne de tout artifice par l’artifice lui-même. L'activité mimétique de la photographie capote. Et comme dans le Portrait ovale de Poe la vie passe intégralement de la réalité à l'art, mais avec Cindy Sherman ni l’une ni l’autre sont, à la fin, laissés pour "morts". Et le meurtre restera métaphorique. Ce qui n’exclut pas pour autant sa violence

Jean-Paul Gavard-Perret

Ingvid Goetz, Karsten Löckemen & Sammlung Goetz, Cindy Sherman, Hatje Cantz Verlag, Berlin, avril 2020, 184 p.-, 30€

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