Marie-Paule Bargès : le rêve de la langue, le murmure des fontaines

 

« Fontaines » est l’histoire du partage absolu. L’éros se fait doux et violent dans l’encore que Marie-Paule Bargès psalmodie en osant oublier les anciennes mémoires pour atteindre la chambre où les regards se croisent avant que la langue ne creuse l’exclamation du plaisir dans la parenthèse du pubis. Nulle exhibition pourtant en ces fontaines soulignées de manière minimaliste et rythmique par la musique de Poivert au moment où les textes de Marie Paule Bargès font plonger au sein du cœur et du corps de l’intime et son défilé de feu.

La poétesse aurait dû rester vocalement seule tant le soliloque qui lui va si bien. Passant du je au elle, sa mélopée est ténébreuse et insistante en des soupirs créateurs d’une narration poétique où s’ose le murmure du centre de l’amour. Tout est douceur dans les parois de chair humide. « Trop tard pour méconnaître pour faire semblant », le corps est au bout des doigts désorienté en des « gestes longs de noyade ». Et de suspens.

Rarement l’amour et le sexe sont évoqués avec tant d’évidence L’amour sensuel est traqué par effet de surface et de profondeur pour suggérer un état d’existence absolue dans le temps. Ailleurs tout fait silence. Même la musique, en une expérience de dépossession de soi, s’affaisse pour souligner la plus grande proximité de soi à l’autre, de sois à soi. Sans compte, reste l’impossible du chant du corps et de l’âme par le désir toujours plus attirant et étrange là où le deux est un acte de mystérieuse et provocante piété. Avant, longtemps, après.

Jean-Paul Gavard-Perret

Marie-Paule Bargès, « Fontaines », musique de Philippe Poivert, 2017.

https://philippepoivert.wixsite.com/fontaines

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