Catherine Andrieu par et pour l'amour

Catherine Andrieu parvient à produire le lieu d'expériences amoureuses entre deux abîmes : celui du ciel et celui de la terre, ou celui du vide et du plein.
Elle crée des illuminations profanes. Le support-livre n’est plus le fond neutre des choses à voir mais le champ actif d'imprévisibles expériences visuelles. Chaque poème lyrique en ses évocations devient l’extrapolation capable de multiplier des signes organiques et spirituels  propres à créer un vertige.
Les textes permettent d’imaginer bien des horizons. On cherche leurs traces, leurs indices tout en sachant que leur rencontre est impossible et - bien sûr - leur seuil infranchissable. Mais ce qu’on aime justement tient à ce nécessaire écart. Lectries et lecteurs comptent sur les gouffres ouverts par une telle créatrice. Avec elle le début n’est jamais fini et jamais n’est close l'histoire.
Dans cette aire de récupération, de réparation et de déplacement les normes comme les habitudes d'envisager l'amour sont revisitées.  Les poèmes brouillent les grilles de lecture, créent des torsions programmatiques, obligent à plonger en eaux troubles.
L’auteure dégage le réel de son étau physique sans toutefois le porter vers le vice de l’idéalité. La langue se fait aussi sourde que légère. Elle métamorphose ce qui fut en une poétique d'avancées pour séparer l'être du réel au profit d'extases nues.

Jean-Paul Gavard-Perret

Catherine Andrieu, Le cliquetis des Mâts, Editions Rafaël de Surtis, octobre 2023, 90 p.-, 19€

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