Mille soleils splendides - par l'auteur Des Cerfs-volants de Kaboul

MILLE SOLEILS SPLENDIDSAvant que les journaux télévisés ne consacrent leur une à la guerre en Irak, l’intervention américaine en Afghanistan, les exactions des talibans faisaient l’objet d’un traitement quotidien. C’est à cette occasion que le monde a découvert le sort des Afghans et surtout des femmes afghanes, ces ombres mouvantes, complètement ensevelies sous les tentes moustiquaires que sont les burkas. J’ai gardé le souvenir d’images volées de l’exécution d’un homme : la vidéo le montrait à genoux entre les poteaux d’un but. Le cinéaste était assis sur les gradins du stade de Kaboul…

Ces souvenirs enfouis, comme l’est d’ailleurs, la situation actuelle de l’Afghanistan, ont ressurgi à la lecture du dernier roman de Khaled Hosseini, Mille soleils splendides, qui n’a rien à envier à son premier roman, Les cerfs-volants de Kaboul. L’auteur nous fait découvrir 30 ans de l’histoire de ce pays : sa dernière période de stabilité, le coup d’État, l’invasion russe, la guerre civile entre Moudjahidin, l’arrivée des talibans et l’intervention américaine. Mais surtout, il retrace l’histoire de deux femmes que tout opposait mais qui vont s’unir pour lutter contre la violence de leur mari.

La première, Mariam est une harami, une bâtarde qui vit avec sa mère, retirée dans une Kolba. Après la mort de cette dernière, repoussée par son père, elle est contrainte d’épouser un homme de trente ans son aîné. Pour son plus grand malheur, elle se révèle incapable de lui donner une descendance. Inutile, elle doit alors se soumettre aux coups.

Parallèlement, nous suivons le parcours de Laïla. Celle-ci, née dans une maison voisine, est la fille d’un universitaire licencié par les talibans. Elle grandit dans l’ombre de ses frères partis se battre au côté du lion du Panjshir. Son seul bonheur est de retrouver son ami d’enfance Tariq dont elle tombe amoureuse. La guerre les sépare et surtout la prive brutalement de ses parents qui décèdent lors du bombardement de leur maison.


 Sauvée par le mari de Mariam, elle est contrainte de l’épouser pour sauver son honneur. Le destin les réunit donc. Si Mariam rejette dans un premier temps celle qui semble lui voler son mari, elle finit par l’adopter et la considérer comme sa fille. Elles sont également unies devant la brutalité et la misogynie de leur mari. Mais là où Mariam s’est soumise, Laïla se révolte. Le drame qui s’en suit, entraîne la disparition tragique de l’une de nos héroïnes mais ce serait pêcher que d’aller plus loin.

Khaled Hosseini décrit leur situation, leur vie dans l’univers clos de leur maison et de leur burka. De l’intérieur, aussi, parce qu’il alterne les points de vue de la soumise et de la révoltée que sont Mariam et Laïla. Il présente donc deux magnifiques portraits de femmes, l’un répondant à l’autre, Mariam nous donnant sa vision de Laïla et inversement. Tout cela peut sembler logique : qui d’autre qu’une femme serait capable de nous livrer cet univers ? Il s’agit d’une des raisons qui rendent ce roman poignant car il nous livre une vision intimiste de la femme afghane. Touchant également, car malgré les drames vécus, l’auteur nous donne une vision optimiste de l’Afghanistan qui tente aujourd’hui de se reconstruire.


Julie Lecanu

 

Khaled Hosseini, Mille soleils splendides, 10/18, janvier 2009 (Belfond, octobre 2007), 416 pages, 8,60 €

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