" A l'encre de Chine" - Christian Lejalé de Loulou graffiti au céleste Empire

Thèmes Roman

Christian Lejalé est un artiste éclectique : après avoir monté des expositions photographiques, il s’est lancé dans la création de grands spectacles collaborant avec Shaun Davey, un compositeur irlandais, pour Brendan voyage, spectacle mêlant orchestre symphonique et images géantes. Il est également producteur, scénariste et réalisateur de films comme Loulou Graffiti (1991). La dernière corde à son arc est l’écriture puisqu’il a sorti son premier roman en 1995, Docker, qui a obtenu le prix des Lycéens de Marseille et le prix René Fallet. Ce n’est que récemment qu’il a étendu les activités d’Imagine and Co à l’édition de beaux livre comme À l’encre de Chine - Edition originale, publié en octobre 2010, illustrée de calligraphies et de sceaux chinois. La réédition de ce magnifique roman — les illustrations en moins — permettra à beaucoup de découvrir l’histoire méconnue de l’Empire Céleste au moment où se dernier se délite peu à peu.

Yuna, celle qui danse avec le vent.

Yuna est la fille du Maître, celui qui aurait pu sauver la Chine face à l’appétit des Européens et surtout face à l’ambition dévorante de l’impératrice T’seu-Hi. Après une vie longue et tumultueuse, elle décide de raconter l’histoire de sa famille, les Wang, du chemin des Lucioles jusqu’à la cité interdite où son père a touché du doigt le pouvoir du fils du ciel. Touché seulement car l’amour va causer sa perte : celui de l’impératrice qui se transforme en haine parce qu’il est déçu et celui que lui inspire Fleur de Sorgho qui se retournera contre lui et sa fille. Des guerres de l’opium à l’incendie du palais d’été et à la révolte des Boxers, Yuna retrace plusieurs histoires d’amour sur fond de tragédie historique.

À l’encre de Chine est une histoire vraie sous la forme d’un roman : il aura fallu à l’auteur une enquête de trente ans et sept voyages en Chine pour retracer, à travers Yuna, l’histoire d’un des plus grands empires du monde et de la femme qui va dominer son histoire à la fin du XIXe siècle. L’impératrice T’seu-Hi ou Cixi est rentrée dans la cité interdite pour y mener la vie recluse des concubines mais c’est sans compter sur son ambition dévorante. La naissance du futur Fils du Ciel (bien que sa paternité soit mise en doute) lui assure une place importante à la cour. À la mort de l’empereur, elle profite de la minorité de son fils pour prendre un pouvoir qu’elle ne lâchera pas pendant 50 ans. Les plus folles rumeurs courent sur son compte : trahisons, complots, assassinat de son propre fils. Incapable de faire face aux ambitions européennes et de sortir son pays de l’archaïsme qui est en train de l’asphyxier, T’seu-Hi marque le déclin d’une dynastie.

Sous la plume de Christian Lejalé, la Chine renaît et dévoile un visage mal connu, celui d’un grand empire sur le déclin, en but aux aspirations coloniales des Européens et à l’incapacité d’un régime à se réformer et à intégrer les différentes minorités qui la composent. La fluidité de l’écriture nous entraine de chapitre en chapitre et participe à nous plonger dans un rythme de vie et une atmosphère lointaine. Nous pourrons poursuivre notre voyage avec le livre 2 dont la sortie est prévue en janvier 2012.

Julie Lecanu

Christian Lejalé, A l'encre de Chine, Imagine and Co, septembre 2011, 209 pages, 15,50 euros