Le Roi du macadam est un petit bijou comme il en pousse parfois, sur les pavés de l'Angleterre industrielle
L'ancien
portier et petite frappe locale Royston Blake, gros gabarit mais petite
tête, est de retour à Mangel, ville comme on pourrait dire fin de tout,
trou du monde et ville des M(audits-)angel(s)... Il est décidé à
s'amender, à suivre les conseils de son psychiatre et à trouver un
emploi régulier, digne de ce qu'il fut et des rêves de notabilité qui
brouille sa vision du monde. Ce n'était pas n'importe qui, Royston
Blake, les lecteurs des Clopes et de la binouze le savent bien. Cette suite, Le Roi du macadam,
riche en révélations sur sa personnalité et les bas-fonds de Mangel,
ravira les plus fervents admirateurs de polars brute de décoffrage !
Charlie Williams maîtrise parfaitement son personnage, et nous le rend sympathique, nous montre la réalité vue du côté de l'abruti tout en lui permettant d'esquiver les chausses-trappes et finalement de rester là, loin peut-être de ses vues initiales, mais vivant et plein d'espoir. Heureux, finalement, dans un monde en mutation, de montrer que la puissance du vide qui le pousse à agir n'est pas rien. Vivant et d'une grande richesse dans la critique sociale, plein d'un humour acide et noir qui porte la lecture de bout en bout, Le Roi du macadam est un petit bijou comme il en pousse parfois, sur les pavés de l'Angleterre industrielle.
Loïc Di Stefano
Charlie Williams, Le Roi du Macadam, traduit de l'anglais par Thierry Marignac, Gallimard, « série noire », février 2009, 322 pages, 22,50 €
Tout
n'est pas clair dans la tête de Royston. Sauf qu'ancien portier du plus
illustre pub de la ville, il a un statut et une réputation qu'il compte
bien reprendre au sortir de la prison-psychiatrique où il a été interné
après avoir avalé une grosse poignée de bonbons — des amphétamines...
Mais il a fait un travail sur lui, il compte bien retrouver sa femme, sa
maison, et pourquoi pas devenir citoyen modèle, cadre supérieur,
acheter cette grosse voiture qui fera toute la différence, la maison
avec jardinet dans les beaux quartiers... Sauf que voilà, Royston
revient et le monde a changé, son monde n'est plus : la petite ville
crasseuse est maintenant sous l'influence d'un centre commercial qui
focalise toutes les envies et tous les ressentiments : les envies des
potentiels employés et des clients, les ressentiments des petits
commerçants. Et Royston, sans même le savoir, et sans rien comprendre du
début à la fin, va se mettre au milieu d'un bordel pas possible : entre
ceux qui veulent faire sauter le centre commercial pour en finir avec
la concurrence et ceux qui veulent le braquer, Royston est choisi à
chaque fois pour être celui par lequel l'opération va aboutir. Mais,
bien sûr, personne ne lui dira rien et c'est tout seul, comme un grand
benêt, qu'il va se sortir de situations difficiles.
Au passage,
Charlie Williams pousse la psychologie de son personnage et nous donne à
comprendre, dans ce polar social noir mais hilarant, les origines du «
mal » de Royston, le rapport à son père et à sa mère, aux femmes, à la
violence, et surtout à la vie, qui va changer radicalement pour lui
quand il apprend qu'il a un fils, un petit Roy à éduquer comme lui ne
l'a pas été. Le roman est construit par alternance de scènes « en direct
» et de scènes souvenirs des entretiens de Royston et de son
psychiatre, où la brute va se dévoiler. Mais, magie du roman, il lui
arrive le plus souvent de ne pas comprendre ce qu'il nous apprend, et
d'avancer à la recherche de fantômes qu'il vient juste de tuer, faut
quand même pas trop pousser le roi du macadam et se mettre entre lui et
ses nouvelles ambitions de respectabilité !
Charlie Williams maîtrise parfaitement son personnage, et nous le rend sympathique, nous montre la réalité vue du côté de l'abruti tout en lui permettant d'esquiver les chausses-trappes et finalement de rester là, loin peut-être de ses vues initiales, mais vivant et plein d'espoir. Heureux, finalement, dans un monde en mutation, de montrer que la puissance du vide qui le pousse à agir n'est pas rien. Vivant et d'une grande richesse dans la critique sociale, plein d'un humour acide et noir qui porte la lecture de bout en bout, Le Roi du macadam est un petit bijou comme il en pousse parfois, sur les pavés de l'Angleterre industrielle.
Loïc Di Stefano
Charlie Williams, Le Roi du Macadam, traduit de l'anglais par Thierry Marignac, Gallimard, « série noire », février 2009, 322 pages, 22,50 €
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