"Kaïken", le thriller chambara de Jean-Christophe Grangé

Olivier Passan est un super flic, "le meilleur du monde" selon son épouse Naoko. C'est un couple étrange : lui, enfoncé dans la noirceur du monde, se purifie par sa passion immodéré pour la culture traditionnelle japonaise ; elle, l'archétype de la beauté japonaise froide et impavide, conspue ses origines. Ce hiatus va faire qu'ils vont se séparer. Kaïken commence quand le couple est sur le point de se séparer, garde alternée, avocats, pensions... Et l'histoire du couple va être la trame de fond du polar de Jean-Christophe Grangé, construit en deux moments (et trois parties : "Craindre", "Combattre", "Tuer")

Premier moment. Passan mène de manière très chaotique une enquête sur un tueur particulièrement sadique qui a sans doute un compte à régler avec le concept de maternité : il tue des femmes enceintes et brûle le bébé, qu'il aura extrait par éventration, encore accroché au cordon, l'immolant par le feu. Passan connaît le tueur, il est sur ses traces, comme pour un duel d'honneur, et le tueur en fait son ennemi intime, celui par la défaite duquel il atteindra sa quête personnelle.
Mais quand on retrouve des signes d'intrusion dans sa propre maison, Passan commence à perdre tout contrôle et à devenir un danger pour lui-même. Il est certain que le tueur se moque de lui et attend

"Deux solutions. Soit elle ne connaissait rien aux coutumes japonaises. Soit elle se considérait comme un ange de la mort. "

Second moment. Les avanies du couple Olivier-Naoko continuent et la résolution de l'enquête policière ne change rien aux intrusions de plus en plus insidieuses. C'est maintenant Naoko qui va prendre le relais, non pas comme centre narratif mais comme actant, car c'est autour d'elle et d'un terrible secret que va se construire la fin de Kaïken, et l'arme sacrificielle de la tradition nippone va donner tout son sens au roman, le justifier à rebours.  En apothéose, le roman se termine en chambara (1) comme pour unir, la tradition japonaise et un Japon fantasmé.

Si ce n'est certainement pas le roman de Jean-Christophe Grangé le plus abouti, ni le mieux construit, et auquel on préfèrera un Miserere ou La Forêt des Mânes, ces grands romans à l'atmosphère moins "policière", Kaïken est tout de même très prenant, autant par la qualité de l'intrigue que par l'histoire du couple Olivier-Naoko, sorte de Belle et la Bête réinventée.

Loïc Di Stefano

Jean-Christophe Grangé, Kaïken, Albin Michel, septembre 2012, 472 pages, 22,90 euros

(1) Chambara : genre théâtral et cinématographique traditionnel japonais de bataille de sabres 

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