Écrire... Qu'est-ce qu'écrire ?

La récente expérience d'une amie – appelons-la Sandrine – engagée auprès d’un auteur et d’un professionnel du métier du livre m'inspire aujourd'hui cette nouvelle chronique en laquelle, s’ils me lisent, les protagonistes se reconnaîtront sans doute.

Ayant été pressentie puis choisie pour écrire une courte préface, Sandrine en fournit tout d'abord une première mouture pour s'assurer que l'esprit de son texte serait bien, tout au moins à peu près, en phase avec ce qu'était en droit d'en espérer son commanditaire.

Une première série de corrections suggérée par ce dernier ne lui posa pas de problème majeur puisque son texte n'était vraiment encore, je l'ai dit, qu'au stade du tout premier jet, succédant à celui du brouillon.

À la suite de quoi Sandrine livra assez vite sa version définitive : deux pages, qui satisfirent l'auteur puisque celui-ci lui écrivit tout simplement : Parfait ! ; lui mettant cependant la puce à l'oreille quant à de possibles remarques ou réprobations à venir de la part du correcteur-maquettiste : On verra ce qu'en dit Joël.
Joël qui, sans tarder, adressa en fait en retour à Sandrine SA propre version du texte, revisité, mais ayant néanmoins subi de sacrées coupes sombres et s’en trouvant donc non pas véritablement réécrit, mais tout à fait habilement "reconditionné" !

Morale de l’histoire ? Je ne sais s’il y en a effectivement une, mais l’histoire elle-même est classique. À savoir qu’un auteur s’auto-attribue parfois, il est vrai, des qualités d’écriture souveraines, n’acceptant le moindre reproche. De l’autre, celles et ceux qui travaillent dans le métier du livre, mais en fait n’écrivent pas véritablement au sens artistique du terme, croient de leur côté que ce qu’ils ont appris de leur métier suffit et prime.
L’écrivain étant pourtant celui-là seul qui peut se permettre beaucoup de liberté : jusqu’à celle de tordre le cou à la langue française, s'il le faut, pour mieux la faire sienne. L’exemple le plus frappant en est pour moi Delteil.

Correcteurs et traducteurs – on se souvient du fameux Traduttore, traditore, en français : Traducteur, traître – n’ont pas un métier facile, car situé à l’interface de deux façons d’appréhender les textes, surtout quant à la mise en forme ; ce qui, par voie de conséquence, sans jeu de mots, peut très facilement atteindre le fond ! Le piège majeur étant pour eux, il me semble, de pratiquer le lifting et de s’arroger par là plus de pouvoirs qui n’en ont en dévitalisant ainsi le texte.

Écrire... Qu’est-ce qu’écrire ?

André Lombard

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