Lucie Paye : duo

Avec son premier roman, Lucie Paye évoque un amour inconditionnel et une exigence de vérité. Les deux sont  entravés. L'auteure les dessine mais elle tresse aussi, d'une écriture singulière et limpide, une énigme poignante.

La femme s'acharne à retrouver ou à espérer un amoureux qui l'a quitté. L'homme (un peintre) à l'inverse voit apparaître un personnage étrangement familier. D'où le choc de deux aventures humaines qui vont se torsader dans un subtil exercice de fragilité.

C'est comme si un – seul – marche en regardant ses pieds tandis que ses mains tracent mécaniquement un portrait mesuré. L'autre, plus éloignée de qui l'a abandonné, avale des trottoirs désertés, écrit une lettre qui se veut dernière, pour ranger le désordre et s'ensilencer.

Le premier semble dire "Quand je rencontre une image, je veux lui redonner son volume car je la ressens comme emprisonnée".
La seconde pense que lorsqu'elle croit voir un fantôme il faut l’emprisonner. Et l'auteur obtient ainsi des failles et des lignées.

Les deux défient l'à peine encore possible. Et c'est là la beauté de ce premier roman des ultimes fragrances. Lucie Paye transforme les données objectives du réel. Tout se retrouve lointain et proche. L'auteure casse le piège des contours, crée la débandade des horizons afin de montrer des confins plus proches. Et dans le genre c'est plus que bien là où il s'agit de savoir comment tenir debout en des glissements de niveaux.
 

Jean-Paul Gavard-Perret
 

Lucie Paye, Les cœurs inquiets, Gallimard, mars, 2020, 152 p.-, 16 €
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