Giorgio de Chirico : métaphysique & peinture

Si l’abolition du sens en art fut mise à jour par Nietzsche et Rimbaud, les inventeurs en quelque sort, ce sera Giorgio de Chirico qui la réalisera le premier en peinture. Porté par Apollinaire et le galeriste Paul Guillaume, ce peintre majeur de l’art moderne est encore trop peu connu. D’où cette initiative qu’il faut saluer. À placer sous l’égide d’une culture européenne.
Né en Grèce, Chirico aura sa révélation à Munich (face aux peintures de Böcklin et de Klinger et écrits de Schopenhauer), étudiera à Milan et Florence, peindra et exposera à Paris. Touchera au sublime lors de son séjour à Ferrare (1915-1917). Désireux de faire la nique à son temps, De Chirico fréquentera les avant-gardes, participera aux Salons, s’ouvrira au monde à Berlin (avec Walden) ou à New York (avec Stieglitz)…

L’esthétique de Chirico est singulière, éminemment originale, un art intérieur et cérébral qui n’a point de rapport avec celui des peintres qui se sont révélés ces dernières années, souligne Apollinaire en 1913.
En effet, en introduisant la notion de répétition, le peintre a simplement décliné le cauchemar d’une place fantôme devenue un lieu, la peinture, dont on ne sort pas…

Au printemps 1914, le voilà maître d’un nouveau système expressif aux possibilités infinies. Chirico décline alors dans ses tableaux une théorie de l’art conçu comme une forme de rédemption et de salut. Une renaissance mystique. Que ce soit en France ou en Italie, Giorgio de Chirico consacre ses premières peintures métaphysiques au cœur d’une atmosphère archaïque.
L’immobilité règne. Le temps s’arrête… Même si certaines toiles montrent en horizon un train qui file à toute vitesse…
Le dessein du peintre est de montrer un art où l’esthétique sert une faculté intuitive. Une pensée divinatoire. Le regardeur participera aux rituels imposés par l’artiste.



L’exposition du Musée de l’Orangerie fut interrompue pour raison sanitaire. Et je fus parmi les victimes collatérales. Pour me consoler, une visite virtuelle et un très beau catalogue aux pages de garde ensorceleuses. Rien ne vaut la confrontation face à face. Mais c’est tout de même mieux que rien…
Laissez vous emporter dans le rêve poétique d’une telle peinture.

 

Annabelle Hautecontre

 

Paolo Baldacci (sous la direction de), Giorgio de Chirico – La peinture métaphysique, 160 illustrations couleur, 195 x 285, Hazan, septembre 2020, 240 p.-, 39,95 €

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