La prégnance du virtuel selon Lucie Rico

Dans GPS Lucie Rico décrit notre univers envahi par le numérique. Celui-ci – et contrairement à ce qu'il laissait espérer – au lieu de favoriser notre existence nous emmène vers la déshumanisation et le chaos.
Les deux étaient déjà présent dans son premier roman, le Chant du poulet sous vide : ce double constat se prolonge dans ce deuxième opus. Sa protagoniste aux prises avec un GPS, ou plus exactement Google-Maps est engluée dans une crise personnelle et ne cherche même plus à quitter son appartement.
Sa meilleure amie Sandrine l’invite à la célébration de ses fiançailles. Pour l’aider à trouver le lieu de la soirée, elle lui partage sa localisation GPS. Le point rouge représentant cette amie continue d’apparaître sur le téléphone de l'héroïne : elle ne peut plus lâcher du regard. Le récit devient une course poursuite virtuelle, entre la femme et le point en mouvement qu’elle fixe et qui l'emmène jusqu'à ne plus comment savoir réorienter sa vie. Se crée ainsi entre l’héroïne et ce point, une manière de réinventer sa relation avec Sandrine entre réalité et fiction, vrai et faux, raison et folie. Journaliste de son métier, la première dont le travail se limite à remettre en forme des informations, finit par inventer des faits divers inspirés par ses promenades sur Google-Maps jusque – dans ses mixages – la réalité dépasse la fiction au moment de retrouver le cadavre de Sandrine.
Le roman prouve qu'à travers le monde virtuel tout devient possible – surtout le pire – lorsque l’interface qui présente le monde le dépasse et le transforme. Le tout dans une sorte de délire que l'auteur scénarise avec superbe et froide ironie au second degré.

Jean-Paul Gavard-Perret

Lucie Rico, GPS, P.O.L, août 2022, 224 p.-, 19€

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