L'enfant d'eau : Christophe Esnault

Les fables – qui sont autant des remémorations du passé de Christophe Esnault v  nous font passer de la terre aux territoires des eaux dormantes ou bouillonnantes et qui furent propices à diverses performances : l'enfant y pêchait menus fretins ou silures ou y jeta son chien pour qu'il apprenne à  nager.
Cela sollicite des muscles et du nerf. Pas forcément de l'intelligence. Juste une faculté d'improvisation. Manière aussi de faire surgir de l’inconscient des images naïves et sourdes Enfin presque.  Car  le gamin déluré  s'essaya à diverses formes de bigger splash chères à David Hockney.

De chaque poème s'esquissent des mouvements polymorphes minés par une quantité innombrable de sorte de points de suspension et de cartes de France (ces dernières propagées par un mouvement de perpétuel va-et-vient au nom des rondeurs d'une monitrice de centre aéré).
Tout pourrait sembler le fruit d''une existence sans qualité. Mais de fait tout est parfaitement écrit. Et la pêche – qui n'est pas un péché – devient expression rhétorique de l’écart, d'un rabâchage gestuel apparemment chaotique mais construit sur des effets de reprises et de variations.

Le corps va. Ou ne va pas. En diverses prises et moments. Jusque dans des rayons de lune où l'adolescent discret et peu disert écoutait l'émission pop de Lenoir sur France Inter.
Mais désormais exit la mélancolie, la tristesse. Comme celui des poissons, le corps du poète remue et frétille. La parole déferlante devient  le lieu  où peut se vérifier une infime partie de ce qui a disparu. Pour Esnault il ne sagit pas de noyer le poisson mais d'être heureux comme lui. Du moins lorsqu'il est dans l'eau.

 

Jean-Paul Gavard-Perret


Christophe Esnault, L'enfant poisson-chat, Publi.net, novembre 2020, 110 p., 12 €

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