Jacqueline Merville, L'héroïne qui écrivait

Jacqueline Merville a survécu à la violence d'un système, à la folie, au tsunami du sud-est de l'Inde (The black Sunday – 26 décembre 2004, en 2005), à la torture en Afrique (Presque africaine, en 2010). Jacqueline Merville est une héroïne.
Afin de ne pas être que cela, elle a écrit des livres.

Des romans, surtout. De grands romans, très puissants, mais brefs. Elle avait commencé avec La Ville du non, en 1986. Déjà, elle faisait trembler les mains de ses lectrices.

Inutile de répéter ici l'immense admiration que j'éprouve pour cet auteur. Pour cette femme. Pour cet écrivain. Il y a certainement beaucoup à dire sur les éditions des Femmes, mais le seul fait qu'elles aient traduit Clarice Lispector, édité Hélène Cixous, et déniché Jacqueline Merville – rien que ça !... justifierait à lui seul que les dames qui lisent leur tressent des couronnes de lauriers. Quant aux messieurs, chapeaux bas ! Et à genoux, s'il vous plaît.

Lorsque Jacqueline Merville ou Hélène Cixous publient un livre, on va le quérir, on le lit, et on s'incline jusqu'à terre.
On croira que je plaisante ? Absolument pas. Dans son dernier texte – roman ? Autobiographie ? Les deux ? –, Jacqueline Merville évoque ces années d'adolescence et de jeunesse où elle dut devenir institutrice. Pour manger. Elle n'aimait pas enseigner. Elle crut devenir folle. Ou le devint. On ne sait pas.

Puis elle se mit à dessiner, à peindre, à inventer ces grandes créatures peintes qu'elle avait appelés Les Gardiennes (et que j'avais vues dans une galerie lyonnaise en 1987), elle se mit à écrire, et peu à peu échappa à la folie, ou à quelque chose qui y ressemblait. Elle raconte tout cela et, malgré l'extraordinaire simplicité de son style, le doute s'installe : que s'est-il passé ? A-t-elle été en danger ? Est-elle une mythomane, une simulatrice ? Une très grande artiste qui a été blessée en se cognant au réel ? Un Antonin Artaud femelle ? Une femme qui voulait faire très vite toutes les expériences qui pourraient la transformer en génie ?

En tout cas, on pourra se renseigner en lisant ce texte saisissant. Maintenant, qu'on ne vienne pas se plaindre : les textes de Jacqueline Merville ne vous laisseront pas intact(e)s.

Bertrand du Chambon

 

Jacqueline Merville, Jusqu'à ma petite, éditions des Femmes / Antoinette Fouque, mars 2014, 201 p.-, 14 €

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