"Le dernier des treize" - il ne faut jamais faire de promesse à la légère

Mercedes Deambrosis fait partie des treize auteurs qui ont accepté de jouer le jeu proposé par Patrick Raynal : broder treize romans musclés autour de cette date qui fait fantasmer plus d’une personne, le vendredi 13. C’est ainsi qu’est née la collection Vendredi 13 aux éditions La Branche. Parmi ces auteurs, on retrouve Pia Andersen, Brigitte Aubert ou encore Jean-Bernard Pouy. Dans le dernier des treize, Mercedes Deambrosis dresse le portrait d’une bande de treize « amis » poursuivis par un tueur impitoyable.

 

Ils étaient treize amis inséparables. A l’âge de l’adolescence, ils étaient idéalistes, révoltés, «d’une génération à la con qui a tout raté. » Un soir, saouls, ces treize amis jurent par tous les diables qu’ils ne désarmeront pas et ne deviendront pas comme leurs parents. Pour s’assurer de respecter leur pacte, ils décident d’engager un tueur chargé de les exécuter s’ils venaient à trahir adultes, leurs idéaux. La quarantaine passée, les treize ont oublié leur serment : l’argent, les soucis, le boulot et les compromis les ont poussés à devenir tout ce qu’ils détestaient. Ils travaillent tous ensemble mais ne sont plus vraiment amis et seuls les enterrements les poussent à se réunir. Des occasions qui se multiplient de plus en plus puisque tous les treize jours, l’un d’entre eux est assassiné.

 

 Le dernier des treize est un roman choral : le narrateur principal est l’un des treize et l’on se doute rapidement qu’il est le fameux dernier, l’autre narrateur étant l’inspecteur chargé de l’enquête, Louis-Edouard Dudeuil. Tous les deux sont des loosers, chacun à leur manière. Le premier bosse de nuit dans une boîte de surveillance, passe beaucoup de temps au troquet d’en face, vit dans un bouge et partage sa petite amie avec un comptable. Louis-Edouard Dudeuil quant à lui ne vaut pas tellement mieux : fils de bonne famille, dilettante jusqu’au bout des ongles, il fait le désespoir de son préfet de père qui n’a rien trouvé de mieux à faire de lui que de le faire rentrer dans la police où il détient le sinistre record d’être toujours inspecteur à cinquante ans passés. Seule Mamipou, sa mère, reste d’un éternel optimisme en ce qui le concerne. Deux narrateurs donc qui se répondent au cours d’une enquête pleine de faux-semblants où les apparences sont donc trompeuses. Seul point négatif, le passage d’un narrateur à l’autre n’est pas toujours bien marqué si bien que l’on se perd un peu dans le récit. Cette perte est cependant compensée par le cynisme de l’écriture. En effet, au-delà de l’intrigue qui part d’ailleurs un peu dans tous les sens, ce qui est intéressant dans le roman de Mercedes Deambrosis, c’est la vision de la société qui est présentée en arrière fond. Les personnages abandonnent les idéaux de leur jeunesse face aux réalités économiques, deviennent aigris, agressifs, cyniques. Minés par le métro-boulo –dodo, ils représentent chacun à leur manière un aspect de la société actuelle dans ce qu’elle a de plus désespérant. Autre personnage emblématique de cette société : Mademoiselle Kraminski, une capitaliste psychorigide qui ne vit que pour son boulot   et qui ne voit dans les meurtres que des économies.

 

Un pari qui est plutôt réussi ici pour Patrick Raynal dans ce treizième roman de la collection Vendredi 13.

 

 

Julie Lecanu

 

Mercedes Deambrosis, Le dernier des treize, collection Vendredi 13, Editions La Branche, Mars 2013, 285 pages, 15 euros.

 

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