"La froide vérité", redoutable polar qui tape sur les nerfs
Voilà un premier polar qui ne paie pas de mine — rien de vraiment « nouveau » — mais qui joue admirablement avec nos nerfs.
Jeune
enquêtrice, Julian est choisie pour un programme de stage inter-police,
et atterrit dans dans la campagne perdue de Canaanville, en plein mois
de novembre frigorifique, sous la responsabilité du fameux Winston «
Bear » Edwards, chef de la police locale aussi craint pour ses colères
qu'admirer pour son talent. La belle et la bête, presque, et aussitôt le
duo est jeté à la recherche d'un psychopathe qui a laissé une jeune
fille déchiquetée dans les bois, crime toujours non solutionné à ce
jour.
Dans la relation de formateur - stagiaire, où le gros ours
bourru va bientôt prendre l'apparence du père de Julian trop tôt
disparu, un tiers va semer le désordre. Un médium se présente pour
aider, mais bien vite les doutes sur sa personnalité se font jour :
est-il vraiment médium ? est-il le meurtrier ? est-il un fou qui se
prend pour le médium ? ou plus compliqué encore ? Toute troublée dans
ses croyances sereine de bonne écolière récemment diplômée, Julian voit
des coupables partout, le médium, Estelle la femme d'Edwards (une ours
femelle...), Edwards lui-même... et c'est finalement un duel qui se
dessine, entre le chef de la police et sa stagiaire, tant leur relation
est étrange, tendue.
Sur un faux rythme cassé souvent par l'introspection de Julian et les changements de comportement et d'humeur du Chef Edwards le petit défaut du roman, qui piétine parfois au lieu d'avancer... —, La Froide Vérité est une course de pisteur, avec un rien de retard toujours, et qui nous met face à la plus étonnante des conclusions. A ne pas manquer.
Loïc Di Stefano
Extrapolation
biblique : la ville de cette enquête est Canaanville, et on pense plus
facilement à la Bible qu'à la petite ville de l'Etat de New York (qui
existe bel et bien). Les canaanéens, habitants de cette contrées
phéniciennes de peuplement hébraïque, peuvent voir leur nom « traduit »
en marchand de pourpre, ce qui est assez signifiant dans un polar...
Jonnathan Stone, La Froide vérité, traduit de l'anglais (USA) par Pierre Reignier, Albin Michel, juin 2008, 296 pages, 18,50 euros
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